[e-med] Dons de médicaments périmés en Indonésie

Libération, "Souvent des médicaments périmés", Alexandra Schwartzbrod
http://www.liberation.fr/actualite/terre/201196.FR.php
Mercredi 30 août 2006

Laurence Boiron, 31 ans, pharmacienne lyonnaise, est volontaire à Pharmaciens sans frontières, qui l'a envoyée dès avril en Indonésie en tant que coordonnatrice médicale. A la veille de quitter le pays, elle raconte l'épouvantable casse-tête et surtout la charge financière que représente la destruction des grandes quantités de médicaments périmés ou inutiles envoyés par l'aide internationale.

Pourquoi l'Indonésie se retrouve-t-elle avec un tel surplus de médicaments ? Il y a eu ici, deux désastres coup sur coup : le tsunami du 26 décembre 2004, qui a en partie dévasté la région, et le tremblement de terre de Yogyakarta, le 27 mai dernier. Le premier a entraîné un afflux de 4 000 tonnes de médicaments. Nous avons dû en éliminer environ 250 tonnes en juillet. Le second désastre a donné lieu à des donations plus faibles : moins de 1 000 tonnes. La leçon semble avoir été apprise. Mais il y a encore eu des envois de médicaments inappropriés. On est en train de faire l'inventaire des 50 tonnes restantes. Le surplus sera détruit, après notre départ, par l'OMS. En tant que pharmacienne, ça fait vraiment mal au coeur de voir des médicaments détruits, alors qu'ils coûtent plus cher que le suivi médical.

Qui donne ces médicaments ? Les grosses ONG importent les leurs ou en achètent sur place. En général, avec elles, ça se passe bien. Le gros problème, ce sont les gouvernements étrangers qui envoient des médicaments sans prendre en compte les besoins des pays destinataires. Et aussi les associations de particuliers qui font des collectes de médicaments. Souvent, ils les envoient sans nous donner d'informations sur leur qualité : ont-ils passé un mois en plein soleil, par exemple ?

Quels sont les autres problèmes ? Souvent, les médicaments arrivent déjà périmés car, pour certains pays, cela coûte moins cher de les envoyer à l'étranger que de les détruire sur place. D'autres sont envoyés avec des notices rédigées en chinois, en russe ou en arabe et on ne sait ni de quoi il s'agit ni à quoi ils servent. Certains pays pensent savoir de quoi nous avons besoin, par exemple d'amoxicilline (antibiotiques) et de paracétamol, alors que c'est faux. Du coup, on se retrouve avec huit ans de stocks de médicaments qui seront périmés dans trois ans ! Il existe des règles strictes élaborées par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) les médicaments doivent être connus dans le pays receveur et leur date de péremption dépasser d'au moins un an leur date de réception , mais elles sont peu respectées.

Ne pouvez-vous pas refuser les médicaments inutiles ou périmés ? Ces médicaments sont donnés au gouvernement qui décide de ce qu'il en fait, on l'aide juste à gérer le stock et, malheureusement, le surplus. C'est très dur pour un pays en développement, dépendant de l'aide internationale, de refuser un envoi.

Comment détruisez-vous ces médicaments et à quel coût ? On a comparé des tas de moyens possibles en Indonésie. Le plus sûr, c'est la destruction par valorisation des déchets dans une cimenterie. Pour fabriquer du ciment, il faut un chauffage à plus de 2 000 °C, cela détruit intégralement toutes les molécules organiques. Les médicaments sont donc intégrés avec l'emballage dans un kiln (une sorte de four où le ciment est fabriqué) où ils produisent leur propre énergie, ce qui permet d'économiser celle-ci pour le chauffage du ciment. Cette méthode permet de ne pas avoir de résidus polluants. Le coût de l'opération est de 250 dollars la tonne (sans compter le transport, la gestion, le stockage...). C'est la communauté internationale qui paie, notamment la Communauté européenne.

Votre mission en Indonésie est-elle finie ? Pharmaciens sans frontières va se retirer de Yogyakarta dans quelques jours. L'OMS prendra le relais pour la destruction du reste de médicaments, qui devrait être achevée d'ici à début novembre. Au total, PSF sera resté en Indonésie un an et demi (depuis le tsunami de 2004), avec cinq ou six expatriés et une équipe locale qui variait selon les besoins. On a aidé à faire le tri, les inventaires, les distributions et aussi les formations pour le personnel de santé local.

Avez-vous des équipes au Liban ? Les associations peuvent de moins en moins entrer comme elles le veulent dans un pays. C'est soit le pays, soit la Commission européenne, soit l'OMS qui nous appelle. Les demandes du Liban vont passer par la Commission européenne. Il faudra envoyer sur place une équipe pour évaluer les besoins et monter un projet qui sera validé par les autorités et les bailleurs de fond. PSF souhaite surtout aller au Liban pour aider à la reconstruction du système de santé. On mène aussi de nombreuses missions de développement dans le reste du monde, en particulier en Afrique : mise en place de centrales d'achat, construction de dépôts ou formations diverses pour apprendre à rationaliser les commandes, afin que les médicaments reviennent moins cher. On vient de le faire au Burkina et au Congo.

Ventre affamé n'a point d'oreilles aime t-on dire dans nos pays sous développés, et que la bouche qui mange ne demande pas souvent l'origine de ses aliments;

Cette situation est à décrier car combien de morts ces médicaments périmés de fois utilisés causent aux populations démunies du tiers monde; il faut certes louer le professionalisme de MSF, mais MSF n'intervient pas dans toutes les parties sinistrées du monde ; les pays sous developpés deviennent ainsi des véritables dépotoirs qui sèment malheur et désolation;

Je crois qu'il faudrait peut etre que l'OMS écrive un code de bonne conduite qui doit etre respecté par tous les donnateurs; les pays émergents par ces dons veulent accroitre et developper la coopération sud-sud, les ong humanitaires malheureusement tenues pour la majorité par des gens non qualifiés en matière de médicaments doivent subir un tri rigoureux afin que les pev ne servent pas de champ d'expérimentation.

Okouya Boniface
boniok2000@yahoo.fr

Bonjour,

je pense que depuis la publication des principes
directeurs applicables aux dons par l'OMS et autres
grandes organisations internationales, il me semble que
ces principes entrent difficilement en pratique dans
les Pays en Developpement.
Chez nous au nord Kivu en RD CONGO nous avons essayé de les vulgariser et les partenaires, surtout ONG essaient de les suivre. Mais
c'est pas facile. Les Etats devraient donc elaborer des
texte de loi visant à traduire ces principes en une
réalité pour leur application dans chaque
Pays.
Malheuseusement, certaines organisations ayant
concourues à l'élaboration de ces principes continuent
à faire des dons inappropriés dans les pays qui ne
vivent que de cela. Dommage!

Phcien François.M.R.TSHITENGE
Inspecteur du Nord Kivu/RD CONGO
fmrtshimal@yahoo.fr

Le problème, c'est que l'OMS a édité une première fois des recommandations
en 1996. Celle ci ont ensuite été améliorée en 1999. Depuis ReMeD pour la
partie française a mené une campagne d'information auprès des ONG, des
coopérations descentralisées, a fait un film, édité une plaquette. La même
chose a été faite en Allemagne, Hollande, Espagne.
Pourtant cela continue. En France, l'ordre des pharmaciens a pris clairement
position. Pourtant Cyclamed réapparait, on parle toujours des MNU...
La générosité peut être dangereuse, mais ce n'est pas facile a faire
comprendre.
Au niveau de ReMeD nous gérons toujours le site www.drugdonations.org
sur lequel on peut lire les différentes expériences depuis maintenant 10 ans.

Serge Barbereau
serge.barbereau@wanadoo.fr

Certe, il est possible de rédiger un arrété dans vos pays interdisant
l'entrée de ces médicaments. Il me semble toutefois que la principale
responsabilité est au donateur.
Ces médicaments sont la plupart du temps considérés comme des déchets
puisque ayant perdu la traçabilité pharmaceutique.
Hors leur exportation est interdite par la Convention de Bâle sur le
contrôle des mouvements transfrontaliers de Mars 1989.
Rubrique annexe1 Y3 déchets de médicaments et produits pharmaceutiques. Cela
implique que tous les envois doivent être déclarés aux douanes et contrôlés
à l'exportation. La plupart du temps ce n'est pas le cas. Les textes ne
suffisent pas au nord comme au sud. Il faut une volonté politique.

Serge Barbereau
serge.barbereau@wanadoo.fr

Je suis à la recherche des rapports de recherches, des missions... sur la
fréquentation des hôpitaux généraux de référence.

En effet, comme le nom l'indique, dans les soins de santé primaires,
l'hôpital général de référence a pour principale mission la prise en charge
des malades référés par les structures périphériques (centres de santé).
Seulement, l'expérience nous renseigne que (particulièrement en RDC),
l'utilisation des HGR reste faible (indicateur considéré: taux d'occupation
de lits). Les facteurs sont multiples; il y a entre autre l'organisation de
services. Mais, il semble que le problème se pose même là oú des appuis ont
été apporté en termes d'organisation de services.

Prière donc de me communiquer les résultats des études dont vous avez
connaissance. Je suis moi-même intéressé à participer à une étude de ce
genre.

Ben M.MUNONGO
PROJET SanruIII
ECC-IMA
RD CONGO

benmunongo@sanru.org