[Pour lire le rapport de Philippe Kourilsky aller à
http://www.college-de-france.fr/site/imm_mol/p1149514627594.htm CB]
La lutte contre les maladies infectieuses au coeur du G8
LE MONDE | 11.07.06 | 14h40 . Mis à jour le 11.07.06 | 14h40
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3244,36-794289@51-628865,0.html
La lutte contre les maladies infectieuses sera l'un des trois grands thèmes
de la prochaine réunion du G8, qui se tiendra du 15 au 17 juillet à
Saint-Pétersbourg. A cette occasion, les académies des sciences des pays du
G8, ainsi que celles du Brésil, de la Chine, de l'Inde et de l'Afrique du
Sud ont adopté une déclaration commune demandant le renforcement des actions
internationales contre ces maladies. Ces institutions scientifiques
appellent à appuyer les initiatives pour combattre la grippe aviaire, à
soutenir les pays en développement, à améliorer la surveillance mondiale des
maladies émergentes et des zoonoses, ainsi qu'à mobiliser la recherche pour
de nouveaux vaccins et de nouveaux traitements.
Dans leur déclaration commune, les académies estiment que la lutte contre la
grippe aviaire "pourrait être le catalyseur d'une amélioration de la
recherche et de la capacité à se mobiliser globalement devant une maladie
émergente ou réémergente". Elles soulignent toutefois qu'en matière de
surveillance mondiale des maladies infectieuses, "le système actuel, par la
complexité de ses structures et leur absence de coordination, n'est pas
approprié pour la réalisation d'une couverture mondiale ni pour les
compétences humaines et scientifiques".
Elles plaident également pour le développement de "méthodes plus rapides de
production de vaccins (la capacité mondiale actuelle de production du vaccin
contre la grippe saisonnière est estimée à 300 millions de doses par an)".
Quant à l'action de la France dans le domaine des maladies infectieuses,
elle vient de faire l'objet d'un rapport très sévère de Philippe Kourilsky,
professeur au Collège de France. Le gouvernement français n'a pas encore
réagi à ce texte intitulé "Optimiser l'action de la France pour
l'amélioration de la santé mondiale", qui lui a été rendu le 27 mars.
Dans le combat contre les maladies, "il y a peu nous étions sans doute les
meilleurs, écrit l'ancien directeur général de l'Institut Pasteur. Nous ne
le sommes plus." Il pointe "un décalage flagrant entre le discours politique
justement tenu au plus haut niveau de l'Etat, où la santé figure en tête des
priorités, et les moyens mis en oeuvre dans la réalité".
L'aide publique au développement (APD) fournie par la France se situe en
effet aux alentours de 0,4 % du produit intérieur brut (PIB), encore loin de
l'objectif international fixé à 0,7 %. Quant à la part qu'occupe la santé
dans cette APD, elle ne représente que 4 %, quand la moyenne pour les pays
de l'OCDE se situe à 11 % et qu'elle atteint 18 % au Royaume-Uni. Même en y
incluant l'aide apportée dans des actions multilatérales, la part de la
santé dans l'APD se hisse péniblement à 5 %.
"MANQUE D'EFFICACITÉ"
Qualitativement, l'action de la France "manque d'efficacité et de
lisibilité", peut-on lire dans le rapport. Elle est "trop dispersée et mal
coordonnée, elle procède d'une stratégie mal définie par des acteurs trop
nombreux qui communiquent trop peu entre eux", y compris au niveau
ministériel, constate le professeur Kourilsky. Il évoque une "dérive
budgétaire et organisationnelle, qui dilue une partie des compétences et des
bonnes volontés".
Le rapport préconise vingt-quatre actions, parmi lesquelles un accroissement
de l'effort de surveillance des maladies infectieuses, le développement d'un
"programme cohérent de formations adaptées" et la création pour quatre ans
d'une "Alliance française pour la santé mondiale", dotée d'un minimum de 100
millions d'euros. Le conseil d'administration de cette structure
regrouperait des représentants des ministères, des agences de recherches,
des ONG, des fondations caritatives et des entreprises.
Dans un rapport consacré à "la maîtrise des maladies infectieuses", rendu
public lundi 10 juillet, l'Académie des sciences française a quant à elle
demandé "un effort sans précédent et coordonné de recherche, d'enseignement
et d'actions en santé publique".
Paul Benkimoun
Article paru dans l'édition du 12.07.06