Le Champix, médicament de sevrage tabagique, accusé de provoquer des états
suicidaires
LEMONDE.FR avec AFP | 07.01.11 | 08h30 . Mis à jour le 07.01.11 | 14h25
http://www.lemonde.fr/societe/article/2011/01/07/le-champix-medicament-de-sevrage-tabagique-accuse-de-provoquer-des-suicides_1462125_3224.html#ens_id=1440622Déjà
abonné ?
En France, la revue médicale "Prescrire" notait dès 2008 que les
notifications d'effets indésirables s'accumulaient sur le médicament.
AFP/MARTIN
Plus de 1 200 plaintes ont été déposées aux Etats-Unis contre les effets
secondaires du Champix, un médicament de sevrage tabagique de Pfizer accusé
d'entraîner des états suicidaires, voire des passages à l'acte. En ce début
d'année où la prise de bonnes résolutions peut comprendre l'arrêt de la
cigarette, le Champix (varénicline) - autorisé sur le marché américain en
2006, et français en 2007 sous le nom de Champix - fait l'objet de
nombreuses publicités notamment télévisées vantant ses mérites. L'ensemble
des dossiers émanant de tous les Etats-Unis a été centralisé dans un
tribunal fédéral de l'Alabama. En France, la revue médicale Prescrire
constatait dès le début 2008 que les notifications d'effets indésirables
s'accumulaient sur le médicament et relayait l'inquiétude de la Food and
Drug Administration (FDA) qui mettait en cause la varénicline "dans la
survenue de pensées suicidaires et de comportements suicidaires
occasionnels".
La procédure a été confiée par l'organe judiciaire américain chargé de
centraliser les dossiers comportant des plaintes multiples venant de
différents Etats à une juge unique, Inge Johnson. Si elle n'en est qu'à ses
prémisses, elle pourrait se solder par un chèque très élevé du laboratoire
américain, pour peu que la justice établisse des défaillances dans la
conduite des essais cliniques préalables à la commercialisation du
médicament. Le principal avocat des plaignants, Ernest Cory, a assuré
s'attendre encore au dépôt d'"un millier d'autres" plaintes pour
"négligence" contre le laboratoire pharmaceutique américain Pfizer. "La
plupart des cas présentés impliquent des problèmes neurologiques",
indique-t-il, citant "suicides, tentatives de suicide et trous de mémoire"
et évoquant, parmi les 1 200 plaintes déjà déposées, "bien plus d'une
centaine de suicides réussis". "60 % des plaintes parlent de tentatives de
suicide ou de suicides réussis", ajoute-t-il.
Le laboratoire Pfizer a estimé qu'"il n'existe pas de preuve scientifique
que le Champix ait provoqué les accidents neurologiques rapportés par les
plaignants". "Le Champix est un traitement efficace pour de nombreux fumeurs
qui souhaitent arrêter et nous avons l'intention de défendre ce médicament
utile", a ajouté Victoria Davis, porte-parole du laboratoire.
Plusieurs scenarios sont possibles dans cette procédure qui "avance
rapidement", a expliqué M. Cory. Il a exclu la possibilité de voir celle-ci
aboutir à un unique procès du Champix, jugeant que chaque plainte
individuelle est "un cas unique". La juge Johnson pourrait établir un
canevas général de procédure et renvoyer les plaintes dans chacune de leur
juridiction d'origine ou bien organiser elle-même un ou plusieurs procès
exemplaires. L'éventualité d'un accord financier global entre Pfizer et les
plaignants - tel que celui conclu par Merck dans le dossier du Vioxx, un
anti-inflammatoire à l'origine de dizaines de milliers de crises
cardiaques -, est également envisageable, même si M. Cory a assuré dans
l'immédiat "ne rien en savoir". Si les plaignants obtiennent gain de cause
en justice, il est également possible que la FDA, qui a déjà exigé
l'imposition d'avertissements stricts sur les boîtes de Champix, décide à
terme de retirer le médicament du marché.