Lu dans B.M.J : Paiement de bonus pour changer des habitudes de prescription
Un tribunal aux Pays Bas a débouté une plainte de médecins en vue de bloquer une expérience entreprise par la plus grande caisse d'assurance maladie de ce pays (Menzis), consistant à rémunérer les médecins prescrivant les médicaments génériques les moins chers comme la simvastatine et l'oméprazole en leur offrant des bonus. L'Association des médecins (A.M) avance l'argument « d'exercice d'une influence négative sur le comportement du prescripteur » contre Menzis et « la caisse d'assurance maladie se substituant aux médecins ». La caisse maladie veut récompenser les médecins qui prescrivent à 85 % de leurs nouveaux patients le générique le moins cher de la simvastatine et aux prescripteurs qui mettent sur leurs ordonnances à 95 % de leurs nouveaux malades le générique le moins cher de l'oméprazole. L'auteur signale que simvastatine et oméprazole sont les médicaments les plus prescrits aux Pays Bas. Cette expérience est menée avec 150 médecins généralistes qui ont acceptés de s'y associer à l'heure actuelle. Menzis pense aussi, faire une économie de 3,2 millions d'euros dont une grande partie servira aux bonus et à la promotion de l'usage rationnel. (T. Sheldon . BMJ 2006 ; 332 : 254 ; 4 February 2006). Le tribunal a fait remarquer à l'A.M que Menzis n'a pas touché à la liberté de prescription où à l'obligation d'opérer son propre choix par le prescripteur et « qu'il n'y a rien qui prouve que l'existence de bonus peut dévier les médecins de leurs obligations envers leurs malades ».
Commentaires : Menzis est basé à Groningen, rien d'étonnant quand on sait que la faculté de médecine de cette ville a été l'une des premières s'intéressant à l'usage rationnel des médicaments et qu'il existe même une méthode de prescription rationnelle dite « méthode de Groningen », mais là n'est qu'une partie de l'explication. L'autre partie, c'est le courage de la caisse d'assurance maladie qui met en application le savoir faire dispensé par la faculté et basé sur « un choix rationnel par conviction chez le prescripteur ». En effet, la conviction est entraînée par l'utilisation d'une méthode qui est basée sur des apprentissages de prescription rationnelle en 6 étapes avec à la 3e étape un point fort axé sur « l'analyse multi-attributive d'incidences pratiques du choix (multi-attributive utility analysis) » consistant en un calcul mathématique pour choisir le médicament le plus efficace, le plus sûr, le plus adapté au malade et le moins cher, dans un objectif thérapeutique fixé à l'avance selon l'état pathologique qui a été préalablement bien défini (c'est certainement pour cela que la plainte de détournement du prescripteur déposée contre l'assureur n'a pas marché, n.d.l). Cette méthode est enseignée dans la faculté de médecine d'Alger depuis 1995 et dans les cours francophones qui sont annuellement faits avec l'Oms depuis l'année 2000. En 2004, une équipe franco-algérienne (C.N.P.M et ReMeD) en coopération avec l'Oms, met au point une méthode similaire pour la dispensation rationnelle par les pharmaciens, en partant de « l'opinion pharmaceutique » comme outil d'échanges et de partenariat entre les médecins et les pharmaciens pour administrer aux malades les médicaments génériques les plus efficaces, les plus sûrs, les plus adaptés à leurs cas, les moins chers et de surcroît avec un maximum d'informations et d'attitudes complémentaires à observer pour garantir la sécurité de leur emploi par le malade. Si les caisses maladies de nos pays acceptent de jouer le jeu comme les hollandais l'ont fait pour cette année, nous pourrons dans un avenir pas très lointain, améliorer les prescriptions et les dispensations des médicaments au profit de tous les intervenants (équilibrer le budget des caisses d'assurance maladie, améliorer le quotidien des médecins et des pharmaciens par des bonus, et une meilleure sécurité pour nos malades).
Docteur A. Helali
Professeur de pharmacologie clinique
Directeur du C.N.P.M
Sis C.H.U de Bab El Oued. 16009 Alger
Tel : 213 21 96 50 59