[e-med] Strat�gies des labos pharmaceutiques

E-MED: Strat�gies des labos pharmaceutiques
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La pharmacie punie par la bourse
Deux labos suspect�s d'avoir truqu� leurs comptes; le secteur doute.

http://www.liberation.fr/page.php?Article=41853

Par Gr�goire BISEAU

Lib�ration
lundi 15 juillet 2002

�Le march� n'accorde plus aucun b�n�fice du doute. Si une mauvaise nouvelle
arrive, c'est tout le secteur qui morfle.� Un analyste fran�ais

Les laboratoires pharmaceutiques n'avaient pas besoin de cela. D�j� tr�s
secou�s en Bourse depuis plusieurs mois, quelques grands noms de la
profession ont litt�ralement plong� en fin de semaine derni�re. Tout cela �
cause des Am�ricains Merck et Bristol-Myers, tous les deux suspect�s d'avoir
trafiqu� leurs comptes. Le premier aurait gonfl� son chiffre d'affaires de
12,4 milliards de dollars depuis trois ans. Le second aurait, l'ann�e
derni�re, forc� ses grossistes � augmenter leurs stocks pour 1 milliard de
dollars. La r�action de la Bourse a �t� cinglante : Merck a perdu 11 % en
deux jours (23,8 % depuis le d�but de l'ann�e) et Bristol-Myers a plong� de
13 % en un seul jour (-55,8 % depuis le d�but de l'ann�e). Dans leur chute,
les deux vilains petits canards ont entra�n� le reste de la profession. �Le
march� n'accorde plus aucun b�n�fice du doute. D�s qu'une mauvaise nouvelle
arrive, c'est tout le secteur qui morfle�, dit un analyste fran�ais. Le
fran�ais Sanofi-Synthelabo, pourtant l'une des valeurs stars de l'ann�e
derni�re de la Bourse de Paris, a plong� avec Bristol-Myers. Il a suffi que
le march� se rappelle que les deux labos avaient sign� un accord de
commercialisation sur deux m�dicaments pour que le groupe hexagonal voie son
cours de Bourse s'effondrer de 9,6 % en deux jours (-32 % depuis le d�but de
l'ann�e).

Nababs. Les grands labos n'ont pas �t� habitu�s � se faire traiter de la
sorte. Ils vivaient, depuis des ann�es comme de vrais nababs de la Bourse, �
regarder monter le cours de leur action. Presque sans rien faire. Mieux, en
cas de coup de tabac boursier, les investisseurs se repliaient presque
toujours sur les actions des grands noms de la pharmacie mondiale. Dans le
jargon de la finance, on appelle cela des valeurs refuge. Mais aujourd'hui,
le refuge prend l'eau de toutes parts. �Le march� est simplement en train de
s'apercevoir que notre industrie est beaucoup plus fragile qu'on ne le dit�,
selon un patron de la filiale fran�aise d'un laboratoire am�ricain.

Le monde plein de certitudes de l'industrie pharmaceutique est en train de
se fissurer de partout. D'abord parce que les grands laboratoires sont de
plus en plus violemment attaqu�s par les g�n�riqueurs, ces fabricants de
copies de m�dicaments tomb�s dans le domaine public et vendues beaucoup
moins cher. Si leur poids est encore tr�s marginal en France (il ne
repr�sente que 3 % du march�), ils ont pris une place consid�rable aux
Etats-Unis (environ 40 % de parts de march�), en Grande-Bretagne et m�me en
Allemagne.
L'arriv�e d'un g�n�rique provoque, syst�matiquement, le m�me s�isme :
l'effondrement, en quelques semaines, d'environ 80 % des ventes du
m�dicament original. Certains analystes financiers �voquent le chiffre de 50
milliards de dollars pour �valuer le montant des ventes de g�n�riques d'ici
2005. Voil� pourquoi les grands laboratoires se lancent dans d'interminables
batailles juridiques pour tenter de faire durer le plus longtemps possible
leur brevet. Il va sans dire que les march�s financiers ont horreur de tout
cela. La moindre rumeur d'une attaque d'un g�n�riqueur sur un m�dicament et
le cours de Bourse du laboratoire plonge. �Les grands labos savaient
parfaitement que ce probl�me allait un jour se poser. Mais c'est toujours la
m�me chose : ce n'est qu'au bord du gouffre qu'on se rend compte de la
profondeur du pr�cipice�, dit un analyste fran�ais.

Monts et merveilles. Pour rassurer les march�s, les grands laboratoires ont
promis monts et merveilles.
Notamment des lancements en rafale de nouveaux m�dicaments. Une vraie
surench�re de promesses qui a fini par semer le trouble. �Le march� est en
train de r�aliser que beaucoup d'objectifs ne seront pas tenus.
Le produit miracle, qui se vendra pendant dix ans, c'est termin�.
Aujourd'hui, non seulement les nouveaux m�dicaments co�tent une fortune �
d�velopper, mais, en plus, ils s'adressent � une population souvent plus
restreinte car plus cibl�e. D'o� la difficult�, explique un professionnel.
Sans compter que les folles promesses de la biotechnologie, notamment de la
r�volution de la g�nomique, n'ont pas �t� au rendez-vous aussi rapidement
que pr�vu. �En ce moment, les march�s financiers ne veulent entendre que
des mauvaises nouvelles : des retards de lancement de nouveaux m�dicaments
ou des annulations�, constate Bernard Gilly, ancien patron de Transg�ne,
maintenant directeur g�n�ral de Sofinnova, soci�t� de capital-risque
pr�sente dans les biotechnologies.
L'affaire Imclone, une des stars de la biotech new-yorkaise, dont le patron
Samuel Waskal est entre les mains de la justice, soup�onn� de d�lit
d'initi�, voire d'escroquerie, n'a �videmment pas am�lior� la cote de la
profession.

Plongeon. Voil� donc que la pharmacie mondiale, encore confortablement
assise sur des taux de marge canons, doute. De ses perspectives de
croissance, de ses nouveaux m�dicaments, de la fa�on d'organiser sa
recherche et son d�veloppement. Et quand la rumeur annonce, il y a quelques
semaines, le possible mariage de GlaxoSmithkline, avec Bristol-Myers (lire
encadr�), le cours de Bourse des deux entreprises a imm�diatement plong�.
�C'est comme si le march� ne croyait plus au bien-fond� des fusions dans la
pharmacie�, confesse, d�sol�, un cadre dirigeant d'un laboratoire am�ricain.
C'est dire si la crise de foi est s�rieuse....